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INTERVIEWS > Andy J. Forest


         

Interview réalisée le 08/04/00
par Cédric Vernet
              

C'est après son concert survolté lors du Salaise Blues Festival, le 8 avril 2000, que nous avons rencontré le bluesman de la Nouvelle-Orléans Andy J. Forest. Une rencontre dans sa loge où régnait une atmosphère faite de joie et de mélancolie, traditionnelle d'une fin de tournée. Nous avons passé ensemble un long moment. Vous trouverez ci-dessous la retranscription de cette interview.

 
Bluesactu.com : Ce concert à Salaise-sur-Sanne était la dernière date de la tournée française. Comment était le public français ?

Andy J. Forest : Formidable.  Tu sais lorsque tu joues en Suisse les gens te demandent : Comment était le public suisse ?, en Italie : comment était le public Italien ? Cela dépend. Tous les clubs ont des publics différents, une ambiance propre. En France, chaque endroit, chaque public a été différent.

 
Bluesactu.com : Tu as une grande admiration pour Little Walter.  Comment as-tu rencontré pour la première fois sa musique ?

Andy J. Forest : Dans le magasin de disque d'un dénommé "Pubba". Lorsque j'avais 14 ans, j'y allais régulièrement. Dès que j'avais 20 dollars, j'y achetais 20 disques puisque un disque coûtait 1 dollar. J'aimais beaucoup les disques de Sonny Terry, James Cotton, Sonny Boy Williamson et aussi Elmore James ainsi que d'autres grands harmonicistes. Un jour ce disquaire me dit "Little Walter ? C'est le plus grand harmoniciste du monde !". Il me tendis un disque de lui édité chez Chess Records. C'était la première fois que je voyais le visage de Little Walter. J'ai toujours ce disque.

 
Bluesactu.com : As-tu découvert la musique avec le blues ?

Ecoutez Andy J. ForestAndy J. Forest : Je ne sais pas, mais la première chanson que j'ai joué avec Tony D. était de Little Walter. En fait, j'ai beaucoup écouté du jazz. Mes parents avaient une grande collection de disques de Jazz ainsi que de Folk [Andy se met à chanter un standard de Doc Watson]. J'aimais aussi beaucoup Billie Hollyday. C'était vraiment une grande chanteuse de blues même si sa musique était plutôt jazz. 
Ensuite, dans les années soixante, ma grande sœur écoutait les Beatles, The Doors, The Rolling Stones, des groupes imprégnés de blues. J'ai cherché à écouter les versions originales et j'ai découvert Muddy Waters, Howlin' Wolf. Je trouvais ça meilleur que les groupes de l'époque.

 
Bluesactu.com : Quels sont les harmonicistes contemporains que tu apprécies ?

Andy J. Forest : Parmi ceux qui sont encore en vie, je citerais Kim Wilson, Charlie Musselwhite, Billy Branch, Rod Piazza, James Cotton, Marc Hammond, Jumpin Johnny, Bo Dilley. En France j'aime également  Vincent Bucher, Jean-Jacques Milteau ou Alain Michel de Valence …

 

Bluesactu.com : Pour tous les musiciens, une chanson raconte une histoire. En ce qui te concerne c'est ton dernier album "Letter from Hell" en intégralité qui est une seule et même histoire, celle du roman du même nom. Est-ce un concept musical que tu vas renouveler pour "The Divine Humidity" par exemple ?

Andy J. Forest : Oui c'est une idée. J'ai commencé à écrire ce deuxième roman il y a un an mais j'étais trop occupé pour pouvoir le finir. L'histoire tournera autour du purgatoire, basé à la Nouvelle-Orléans. C'est une suite de "Letter from Hell" inspiré du "Paradis perdu" de John Milton. En fait, le diable, Lucifer était au départ un ange. Dans le "Paradis Perdu", il essaye de retrouver sa place au paradis. Je pense que c'est un beau concept. L'action serait située à la Nouvelle-Orléans comme un nouveau purgatoire.

 
Bluesactu.com : "Letter From Hell" était au départ un projet de film. Penses-tu toujours à une possible adaptation cinématographique ?

Andy J. Forest : Ca serait bien mais je suis trop occupé par les tournées, les concerts. Il y a deux personnes qui m'ont parlé de faire une adaptation théâtrale. En ce qui concerne le cinéma je ne sais pas. J'ai déjà travaillé dans l'univers du cinéma. Je ne veux pas passer mon temps accroché au téléphone pour essayer de monter le film. Je veux simplement écrire un nouveau roman.

 
Bluesactu.com : Lorsqu'on étudie ta biographie, on s'aperçoit que tu as multiplié les expériences. Tu as été acteur, musicien, tu as fait des centaines de concerts, parcouru de nombreux pays dans le monde et tu as finalement, à 43 ans, fais ce que tu voulais faire toute ta vie : écrire un livre. Quelles expériences as-tu désormais envie de vivre ?
Andy J. Forest : Je veux continuer à écrire. Mon père était écrivain. Mais tu sais, lorsque j'étais enfant, à l'école on nous demandait le métier du père. Je répondais "il va au travail" mais je ne savais pas ce qu'il faisait réellement. Je me rappelle lui avoir demandé un jour autour de la table pendant le repas. Il me dis "je suis écrivain". Je veux moi aussi continuer à écrire.
 
Bluesactu.com : Revenons à ta musique. Elle intègre de nombreuses sonorités cajun, Zydeco. Comment se porte la culture cajun aux États-Unis. Je sais par exemple que tu es assez choqué de voir des groupes de Zydeco qui ne parlent pas un mot de français comme Lil' Brian and The Zydeco Travellers par exemple ?
Andy J. Forest : Oui mais ce n'est pas une critique. Je pensais que tous les groupes de Zydeco provenaient de familles qui parlaient français. Lil' Brian and the Zydeco Travellers est un très bon groupe. Lors d'une conversation avec eux je leur ai demandé s'ils parlaient français. Ils n'en connaissaient pas un seul mot. Ca m'a beaucoup surpris. Le premier chanteur de Zydeco que j'ai écouté était Clifton Chenier. Ce type parlait français sur ses disques. Tu sais, j'habites à la Nouvelle-Orléans où la culture cajun n'est pas présente. C'est par les disques ou les concerts que j'ai découvert la musique Zydeco et la culture cajun. C'est pour cela que je suis surpris de voir que des musiciens Zydeco ne parlent pas le français.
 
Bluesactu.com : Comment vois-tu l'avenir du blues et comment souhaites-tu qu'il évolue ?
Andy J. Forest : Aux États-Unis, des musiciens comme R.L Burnside et d'autres groupes de Chicago jouent du Funk. Cela va s'accentuer dans le futur. Le blues va évoluer vers le funk.
 
Bluesactu.com : Est-ce que l'avenir du blues ne peut-il pas résider dans le mélange d'influences que tu expérimentes entre le blues, le cajun, la country, etc. ?
Andy J. Forest : Chaque groupe va faire sa propre musique. Le jazz a évolué différemment selon les groupes, les interprètes. Les trajectoires musicales ont été différentes pour Sonny Rollins, Dizzie Gillespie, Miles Davis. C'est identique pour le blues. Je ne pense pas qu'il y aura une forme de blues dominante. Chaque groupe va donner son empreinte. Il doit subsister différents styles de blues, de jazz.
 
Bluesactu.com : Au cours de tes tournées, est-ce que tu ressens que le blues revival des années 90 est toujours vivant ?
Andy J. Forest : Non. L'évolution du blues se fait en zigzag. C'est une musique underground qui est toujours présente mais avec une intensité sans cesse différente. Je sais par ma propre expérience que le blues marchera toujours. C'est pareil pour le jazz, la musique irlandaise, le folk. Ce sont des musiques qui ne sont jamais au sommet mais qui sont toujours présentes. Elles peuvent resurgir avec un peu plus d'intensité à un moment donné mais c'est toujours temporaire.
 
Bluesactu.com : Quels sont tes projets ?
Andy J. Forest : Rentrer chez moi et me reposer. Je vais en profiter pour peindre. C'est un nouveau hobbie. Je veux aussi écrire plus.  Ensuite j'ai une nouvelle tournée de prévue jusqu'à fin septembre.
 
Bluesactu.com : Le prochain album sera pour quand ?
Andy J. Forest : J'ai quelques chansons écrites. L'album pourrait sortir avec le livre mais le livre n'est pas écrit donc je ne sais pas. Je souhaite prendre mon temps. Je ne suis pas prêt.
J'ai aussi une autre idée. Nous avons une caméra vidéo en permanence avec nous sur la tournée. Un peu à la manière du film "Blairwish Project" réalisé avec très peu de moyens, je voudrais faire le "Blues Gig Project". C'est la raison pour laquelle je filme les coulisses de cette tournée. On en fera un montage qui devrait être amusant.
 
Bluesactu.com : Merci et bon retour à la Nouvelle-Orléans Andy.
Andy J. Forest : Merci beaucoup à vous. Souvenez-vous des noms des musiciens : Tony D. , Kerry Brown et Jerry Dugger. Merci.
 
 
  POUR EN SAVOIR +
- Site officiel d'Andy J Forest
- Une interview sur le site Bluesnet
            
 
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