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LA
BLUESOTHEQUE |
Chroniques écrites par Francis Rateau
Retrouvez ces chroniques dans le magazine Crossroads
Février 2006
Accueil Bluesothèque
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WATERMELON SLIM
Watermelon slim & the Workers
Northern Blues / Socadisc

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DARREN
WATSON
South pacific Soul
Reed Rocks Records / Global Routes
Music
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TOM
PRINCIPATO
Guitar Gumbo
Dixiefrog / Night & Day

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MUDCAT
The Mess Is On
Music
Maker / Mosaïc Music

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MARC
LELANGUE
Second Hands Roots
Naked Prod / Mosaïc Music

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NAPOLEON WASHINGTON
Homegrown
Sepia Prod / Mosaïc Music

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WATERMELON SLIM
Watermelon slim & the Workers
Northern Blues / Socadisc

Site
officiel |
Rough
Blues
Ce type est un personnage ! Il a la gueule burinée de ceux qui ont manifestement
mené une vie mouvementée, traversé des situations difficiles et mené de rudes
combats ! En y regardant de plus près, ses acolytes musiciens ont du
l’accompagner dans la tourmente. Mais l’on sait bien que ces galères et luttes
façonnent l’émotion du blues. Bill Homans, alias Watermelon Slim, est un vétéran
du Viet-Nam qui participe depuis à tous les mouvements pacifistes et a même joué,
en 2003, dans une pièce de théâtre dénonçant la première guerre en Irak. Son
militantisme acharné a nourri une forme d’intransigeance dans sa vie de
musicien, n’usant d’aucun compromis qui l’a conduit à ne pas pouvoir vivre de sa
musique et endosser le dur métier de trucker ! Après deux disques plutôt
confidentiels, Watermelon Slim gagne enfin, en 2003, ses galons d’artiste de
blues avec une nomination aux WC Handy Awards comme Meilleur Artiste Débutant ! A
la soixantaine bien trempée, on croit rêver, mais cela lui permet enfin de
signer sur un label, le canadien Northernblues (Otis Taylor, Janiva Magness…),
distribué en France, et d’envisager un peu plus de reconnaissance. Car le blues
de Watermelon Slim, ce n’est pas du blues consensuel, ni formaté, mais c’est de
la hargne, des tripes, de la sueur et du groove. Entre giclées électriques et
rage acoustique, guitares slidées et dobros musclés, basse souple et piano,
percussions et harmonica, cet opus suinte l’émotion d’un bout à l’autre sur des
compositions de la Pastèque (d’où lui vient donc ce surnom). Voilà donc enfin le
héros en passe d’être (re)connu par chez nous grâce à une distribution
nationale. C’est une bonne chose car ce combattant de la justice, humble et
travailleur, puise sa musique dans l’âme de la vie. Voilà de bien troublantes
vibrations toutes dégoulinantes de blues. Magnifique !
[Francis Rateau]
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DARREN WATSON
South pacific Soul
Reed Rocks Records / Global Routes Music

Site officiel |
Belle sensation
lointaine de blues
Petit pays réfugié de l’autre côté du miroir terrestre, à l’autre bout
du monde, la Nouvelle Zélande révèle pourtant une bonne poignée
d’artistes à découvrir sur les versants country, blues et roots rock.
Un petit label travaille pour cela, Red Rocks Records, d’où l’on tire
notamment les légendaires Windy City Strugglers qui ont récemment
écumés avec succès quelques salles français. Darren Watson, lui,
arrive tout juste avec un album aussi beau que les verts paysages
néo-zélandais, un opus à couper le souffle ! Comment réunir autant de
bonheur dans une seule rondelle ? Watson semble avoir digéré la déjà
longue histoire des musiques de l’âme pour emporter avec lui
l’héritage à l’autre bout du monde et en restituer un généreux
cocktail très personnel à base de blues (rugueux), de folk (épicé), de
soul (une voix aussi profonde que les fonds marins du secteur), de
roots rock (rude climat). Guitariste à la fière allure et solide
gaillard, Darren Watson explore un catalogue très attractif de ses
compositions avec une subtilité et une finesse rares, que son chant et
son jeu de guitare renforcent pour offrir une émotion époustouflante.
Le ton est à chaque fois d’une justesse étonnante que la sobriété des
arrangements de Darren enjolive, offrant l’essentiel d’une musique
faite pour offrir du sentiment et du rythme. Ce plaisir simple est
aussi renforcé par une bande de musiciens impressionnants, issus pour
la plupart des quelques formations de la région et rompus aux échanges
fréquents et aux bars de Wellington. On se demande d’ailleurs comment,
sur un si petit pays, l’on trouve autant d’excellents musiciens ? Ce
doit être une spécialité néo-zélandaise, avec les moutons et le rugby,
pas peu dire ! On leur souhaite de sortir maintenant de leur contrée
peut-être étroite, et, d’un saut de … mouton, passer en Australie et
d’arriver vite en Europe, car ce Darren Watson-là, y a pas à dire, il
est terrible ! [F.R.]
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TOM
PRINCIPATO
Guitar Gumbo
Dixiefrog / Night & Day

Site du
label
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Gumbo Louisianais
Enregistré juste avant l’ouragan, comme un sale pressentiment, ce disque déverse
un torrent de fluides blues à coup de nappages d’orgue, de hurlements
d’harmonica, d’harangues vocales et brandis avec une guitare hallucinante. C’est
un vibrant hommage que rend cet artiste discret, sans fard, à la sincérité
vraie, un hommage à la culture musicale de la Louisiane, une extase nourrie des
saveurs musquées du gumbo local, souvent chahutées par un déferlement de guitare
électrisée par l’atmosphère de la New Orleans, avant le déluge ! Moiteur
ambiante ! Cet opus suinte le désir, la jouissance, l’excès et le trop plein de
feulements. Véritable ode chargée de références et d’affection pour la cité de
tous les plaisirs, de toutes les musiques, cet album rend Principato encore plus
grand car authentique musicien capable de sublimes envolées, l’âme chevillée au
manche de sa guitare. Le voyage permet de belles escales aux influences variées,
caraïbéennes à la Neville (‘Hey Now Baby’), chaloupées à la Prof. Longhair,
country à la Hank Williams (on n’échappe pas à la ‘Jambalaya‘), boogie rock (‘If
Love Is Blind’), ou même un vague air à la Fats Domino (‘They Took My Money’)...
C’est coloré, vivant et jouissif. Tom Principato, maître des effluves délicates
de notes miaulées sur sa guitare, très Fender, semble en apesanteur, planant sur
une formation calibrée pour ce genre d’exploit : notamment les surprenants John
Perry à la basse, fabuleux Kevin McKendree au piano et Josh Howell à la batterie
(tous les deux ayant joué avec Delbert McClinton) et le très expressif
harmoniciste Mark Wenner des Nighthawks. Tom Principato sait en même temps
rester humble face au talent de ceux qui ont fait la Nouvelle Orléans musicale
mais aime à se glisser dans la fête pour y goûter l’excellent gumbo de son jeu
de guitare. Un beau plat qu’on reprendrait avec volupté !
[F.R.]
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MUDCAT
The Mess Is On
Music Maker / Mosaïc Music

Site officiel
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Prêt pour la teuf ?
Voir et écouter Mudcat, c’est comme une fête au pays des musiques folles,
un jeu à l’intensité dramatique qui porte la salle à l’hystérie et à la joie, un
peu comme un feu d’artifice tiré dans le ciel de vos plaisirs les plus fous.
Rien n’arrête Danny “Mudcat” Dudeck et ses compagnons dans la charge en furie de
leurs concerts, ni les tables, ni les gens, encore moins les femmes…C’est le
diable qui est là, avec son chapeau mou, ses chemises bariolées et sa guitare
pourrie dans les pattes ! Et le diable revient toujours vous taquiner. Revoilà
donc le band d’Atlanta, chargé d’un nouvel album, ‘The Mess Is On’ (tout est
dit), toujours autant coloré : la pochette déjà qui invite au repas en commun,
au partage, mais surtout la folle musique, celle des tripes et du blues, une
giclée d’émotions fortes puisées aux racines du rock mais avec des entrelacs
alternatifs car inclassable. Tous les morceaux sont de Mudcat, ou presque, et la
présence d’une section cuivre, l’Atlanta Horns, rajoute un côté fanfare à la
fête déjà bien engagée. Lil’ Joe Burton, qui a joué avec BB King, appuie de son
trombone les rythmes fous flanqués parfois d’une belle voix féminine, celle
d’une jeune femme nommée Lorl Beth Edgeman. Dave Dubeck saute, éructe, chante,
gratte et ramène son petit monde au centre de la tourmente avec un savant sens
de l’organisation. L’injonction gospel du pape Mudcat, en ouverture de l’opus,
appelle au partage du vin, de la bière, des libations et de la folle ambiance (The
mess is on, the stuff is here, we’ve got corn, we’ve got beer, we’ve got friends…).
Et c’est parti, entre blues et country, ragtime et roots rock, tex-mex et
zydeco, entre piano bastringue, guitares en glissages, accordéon savoureux,
nappages d’orgues, cuivres déliés, percussions azimutées, chants tout à tour
voluptueux ou égrillards, le voyage semble sans fin et jouissif. Asseyez-vous à
la table de Mudcat et profitez de la fête ... [F.R.]
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MARC
LELANGUE
Second Hands Roots
Naked Prod / Mosaïc Music

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Première main
Ce quatrième opus du bruxellois Marc Lelangue est
une tendre et prodigieuse promenade au cœur du blues d’un Blind Lemon Jefferson,
d’un Kokomo Arnold, d’un Big Joe Wiliiams, ou d’un Blind Boy Fuller, des héros
qui enflammèrent ses sens et son goût pour le genre, voire sa passion des
guitares. Hommage, hommage….On revient sans cesse puiser à la source de ses
plaisirs ! Et Lelangue reprend racine, avec ce jeu subtil, presque aérien, que
le musicien surdoué sait rendre aussi envoûtant sur des guitares fabriquées de
ses mains. Ben oui, jouer sur une ‘Lelangue’, ça a quand même plus d’originalité
que de jouer sur une Telecaster Reissue 52, non ? En tout cas, le ‘glandeur
nature’ (titre de l’un de ses précédents disques en français) ajoute un contenu
intelligent à des chansons déjà chargées d’émotion pure, la touche
d’inconvenance qui sied aux gens de biens. Quant à l’humour et la poésie, les
Belges en sont très friands ! Marc Lelangue surprend et nous emmène toujours là
où l’on ne s’y attend pas, dans un autre monde, fait de lumière et de sensations
blues, avec cette surprenante évidence : ce mec est un sorcier de la guitare et
des émotions éthérées. Il a tout compris de ses idoles, et en offrant cette
‘collection de chansons qui font partie de (sa) vie’, le troubadour de Bruxelles
fait jouer la magie et la pureté. On est dans le beau, dans le juste, dans le
Lelangue ! [F.R.] |
NAPOLEON
WASHINGTON
Homegrown
Sepia Prod / Mosaïc Music

Site officiel
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Musique organique
Napoléon vit dans les verdoyantes montagnes suisses
et Washington n’aime rien moins que la musique. Le plus décapant des bluesmen
romans réinvente le concept rock en théâtralisant un album dans la plus pure
tendance progressive. Ce type, à la gueule d’acteur, passionné de littérature
américaine, de guitares à résonateurs et de blues, réalise son destin, dans
l’intimité de ses explorations : "Homegrown", bâtir une architecture
sonore comme une œuvre quasi-symphonique. A coups de mixages magnifiquement
léchés et d’une production savamment étudiée, l’opéra céleste emporte vers un
monde musical inventif, envoûtant et très personnel. La guitare stupéfiante de NW écume les pièces sur fond de nappages d’orgue, de piano, de percussions, de
basse, de mixages et même de chants vaudous du Bénin ! Chaque noté est pensée.
De chaque rythme millimétré sourde une cascade de sensations variées. Chaque
apport, voix ou instrument, nourrit de son aura la veine des sentiments dans une
féerie carrément hallucinante. C’est le charme qui opère et le monde de Napoléon
Washington qui s’accomplit. Ce disque est né dans la douleur du blues pour
grandir dans la plénitude d’une musique rock universelle dont la fragrance reste
sans conteste la beauté et l’émotion. Il y a ainsi des moments magiques,
intemporels, qui marquent l’Histoire, et cet opus est là pour nous le rappeler.
Napoléon Washington a l’intelligence des Justes, l’aventure chevillée au corps,
humble défricheur de sons, et la fêlure de la perfection extrême. Sa musique ne
peut venir que de l’âme ou du cœur, le talent fait le reste mais toujours dans
le respect des anciens et le regard tourné vers demain. C’est grandiose !
[F.R.]
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