|
LES
INTERVIEWS DU
BLUES CAFE |
 JEAN SANGALLY
Interview
réalisée le 7/03/05 dans l'émission Blues Café sur Couleurs FM
par Cédric Vernet et Francis Rateau
Interviewer Jean Sangally est en soi une
expérience ! Personnage haut en couleur de la scène blues hexagonale, cet
amoureux de la langue française et des bons mots n'en est pas à une anecdote
près sur ses origines africaines, sa carrière et les rencontres qui ont
jalonnées sa vie de musicien. Il faut dire que Jean Sangally n'est pas de
ceux qui ont eu une carrière linéaire. Originaire du Cameroun, il a
multiplié les expériences artistiques avant de jouer le blues avec sa "machine
de blues", le Jean Sangally Blues Band. Son dernier album "Monsieur
Sangally" reflète la bonhomie de ce bluesman atypique. On y savoure avec
délectation sa voix puissante aux accents soul, son écriture raffinée et son
sens de l'humour bien affûté !
|
Tu as un parcours tout à fait étonnant
puisque tu as multiplié les expériences musicales tout au long de ta
vie de musicien. A ce propos, comment es-tu arrivé jusqu'au blues ?
|
J'avais un oncle qui était un très grand
artiste au Cameroun dans les années 20 et jusqu'à la fin des années
60. Il jouait de la musique africaine mais dans le même style que des
gars comme Big Bill Broonzy. Quand j'ai écouté les grands bluesmen
américains par la suite, j'ai retrouvé les mêmes essences que ce que
j'avais connu alors, aussi bien par le chant que par le jeu de
guitare. Le blues est une musique avec une forte essence africaine.
Tout le monde a apporté sa contribution au blues, les africains, les
européens, les arabes, etc. Je définis le blues comme le noeud du
sablier. Au départ, il y a les musiques du monde entier, elles se
mélangent et passent par le noeud du sablier qu'est le blues pour
redonner naissance à toutes les autres musiques modernes par la suite.
|
Tu participes d'ailleurs à ce mélange
des cultures puisque tu es d'origine africaine, tu joues du blues et
tu chantes en français avec une voix très soul. C'est un mélange
explosif ! |
Je suis né au Cameroun qui était une
ancienne colonie allemande. Mes grands parents parlaient allemand. Ce
pays a été confié à la France et à l'Angleterre après la première
guerre mondiale. Je suis né dans la foulée. Je me suis mis à parler
français lorsqu'on m'a envoyé à l'école et à découvrir la culture
occidentale et européenne à travers cette langue. D'emblée je l'ai
aimé grâce à un curée sus allemand qui a su nous inculquer l'amour de
la langue française. Quand je me suis retrouvé en France quelques
années plus tard, je me suis aperçu que la musique africaine plaisait
mais que j'habitais dans une région où je ne pourrais pas en vivre. Je
me suis donc intéressé très fortement à Georges Brassens pour m'ouvrir
aussi à cette poésie humoristique et à une écriture très subtile, très
raffinée. Quand j'ai eu envie de me retrouver moi-même, j'ai choisi le
style qui était devenu la synthèse parfaite de mes différentes
influences musicales. Je me suis dit que j'allais chanter le blues
mais plutôt que de le faire en anglais, j'ai voulu le faire en
français.
|
Ton nouvel album s'appelle "Monsieur
Sangally". Qu'est ce que tu as voulu dire avec ce titre ? |
Il y a une double dimension dans ce titre.
Tout d'abord, je l'ai appelé ainsi car il contient entièrement des
créations. Mais derrière se cache aussi un petit peu de superstition.
Henri Salvador avait fait un album qu'il avait intitulé "Monsieur
Henri" qui s'était énormément vendu. Eddy Mitchell a fait la même
chose avec "Monsieur Eddy", un album qui a marché très fort.
Dans ma petite tête de superstitieux, je me suis dit que j'allais
faire comme eux et avec un peu de chance, je pourrais vendre beaucoup
de disques aussi ! [rires] Je ne me suis pas trompé de beaucoup
puisque le dernier numéro du magazine Soul Bag a classé cet album
parmi les meilleurs disques de blues de l'année et j'en suis très
heureux et très fier.
|
On retrouve énormément de musiciens sur
cet album, dont certains invités bien connus de la scène blues
française. Comment les as-tu convaincu de participer à ce projet ?
|
Déjà, le plus grand nombre de musiciens
qu'on trouve sur cet album c'est ma machine de blues, le Jean Sangally
Blues Band. Ensuite, j'ai invité de remarquables guitaristes comme
Rémi Varenne ou des monstres sacrés comme Pascal Mikaelian à
l'harmonica dont Bill Deraîme a dit qu'il était le meilleur
harmoniciste en France. Effectivement c'est un très grand bonhomme. En
fait, sur la plupart de mes disques il y a des musiciens invités. Je
ne fais pas de la musique juste pour me contenter de ma petite musique
tout seul dans mon coin. J'ai besoin de partager avec un maximum de
musiciens ou d'amoureux de la musique. C'est pour ça que je suis
content de voir qu'il y a de plus en plus de monde qui vient à mes
spectacles.
|
On a le sentiment que ce dernier album
c'est l'exemple même de trois notions qui te tiennent à coeur : la
poésie, le partage et une bonne dose d'humour. C'est exact ?
|
Oui, l'humour c'est la cerise sur le
gâteau. C'est un de mes maîtres à penser, Georges Brassens, qui m'a
appris qu'il fallait à chaque fois un zeste d'humour dans tout ce
qu'on fait pour l'embellir.
Jean Sangally sur le net :
http://www.jean-sangally.com
|
|
|
|