MUSIC MAKER
Drink House to Church house
Vol 1
Dixiefrog / Harmonia Mundi

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De la soif à la prière : blues précaire
[15/01/07]
En collaboration avec Music Maker, le label Dixiefrog avait déjà ouvert la
brèche l’an passé en sortant un magnifique double album ("The Last & Lost
Survivors") qui avait permis de découvrir une multitude d’artistes oubliés
et souvent dans la misère. Le label français avait poursuivi avec un superbe
album de Pura Fé. Rappelons que Music Maker enregistre et aide à travers sa
Fondation les derniers représentants du blues originel. Il est soutenu par des
artistes tels que Clapton, B. B. King, Morgan Freeman, Taj Mahal, Pete
Townshend, Bonnie Raitt…L’œuvre musicale bienfaitrice se poursuit dorénavant par
une série de quatre albums intitulés "Drink house to Church House", du
tripot à l’église, en quelque sorte, dont le premier volet, déjà sorti, permet
aussi de visionner une vidéo de 15 mn. La puissance musicale et émotionnelle de
ces chants et histoires des racines de l’Amérique tient naturellement à
l’authenticité et au talent de ses acteurs oubliés du business, brûlés par lui,
pour la plupart en précarité, et dont on a tout piqué, jusqu’à leur œuvre, sauf
l’âme. Ils hurlent un blues rustique, rugueux, douloureux, puisé dans le
tourment, éructé à la limite de la fêlure, chanté jusqu’à l’espoir. Tout le
blues est là réuni, entre franges rurales et notes saturées, blues des bouges et
gospel religieux, éternel chemin sans but autre que d’exalter l’âme et le corps.
Ces enregistrements nous montrent des gens simples dont la musique a toujours
été le moteur de leur souffrance et la voie de leur vie. On fait encore là de
belles découvertes, sept nouveaux artistes, tous étonnants : John Dee Holeman
(aux lancinantes et poignantes mélodies), Alabama Slim (de l’hypnotique boogie
blues à la Hooker), Captain Luke (ses rythmes variés et sa voix caverneuse),
Bishop Dready Manning (du country blues vrai), Haskell Thompson, Macavine Hayes
(la modernité de son style), Little Freddy King. Certains d’entre eux commencent
maintenant à tourner en Europe en général et en France en particulier. C’est
réalisé avec les trop propres et excellents moyens d’enregistrements actuels que
ne connaissaient évidemment pas, jadis, ces bluesmen, mais qui ne semblent pas
les gêner au demeurant, et qui ressuscitent, du coup, ces chants ourdis de
l’enfer. On préfèrera d’ailleurs rester dans le bouge que d’aller à l’église ! A
saisir d’urgence pour les sensations que procure ce bel objet et la bonne œuvre
effectuée pour la fondation Music Maker.
[Francis Rateau]
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